Fitch prévoit une baisse de 15 % du marché immobilier à Dubaï

by Victoria Garcia
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Dubai Property Prices to Fall 15% in 2025, Says Fitch

L’agence Fitch Ratings a publié une prévision annonçant une baisse de 15 % du marché immobilier de Dubaï en 2025. Ce signal d’alerte intervient dans un contexte de pressions macroéconomiques croissantes, de forte dépendance à la demande étrangère et de saturation du marché. Bien que les secteurs résidentiel et commercial aient fait preuve de résilience ces dernières années, les analystes estiment qu’une correction semble désormais inévitable.

Les causes de la baisse attendue

Une surchauffe des prix

Au cours des deux dernières années, les prix de l’immobilier à Dubaï ont connu une forte hausse. Selon Property Monitor, les prix moyens sur le marché secondaire ont augmenté de 20 à 25 % depuis le début de 2023. Fitch juge cette progression insoutenable, largement alimentée par une demande spéculative et un afflux de capitaux à court terme après la pandémie.

Des conditions de financement plus strictes

La hausse mondiale des taux d’intérêt pèse sur l’activité des acheteurs. La Banque centrale des Émirats arabes unis, qui suit la politique monétaire de la Réserve fédérale américaine, a porté son taux directeur à 5,4 % en 2024. Résultat : les prêts hypothécaires deviennent moins abordables, tant pour les acheteurs locaux que pour les investisseurs étrangers.

Une offre excédentaire

Dubaï a fortement intensifié la construction ces dernières années. Environ 35 000 nouvelles unités résidentielles devraient être livrées d’ici 2025. Cette surabondance exerce une pression à la baisse sur les prix, notamment dans les segments moyen et haut de gamme. Fitch met en garde contre un déséquilibre entre l’offre et la demande, notamment dans des quartiers très urbanisés comme Dubai Marina, Dubai Creek Harbour et Dubai South.

Les segments les plus exposés

Immobilier résidentiel

Fitch se montre particulièrement préoccupée par le segment du luxe (appartements et villas), qui a été très prisé en 2023–2024 par des investisseurs russes, indiens, chinois et européens. Ce segment pourrait subir les plus fortes corrections, avec des baisses de prix allant jusqu’à 18 %.

À titre d’exemple, les villas de luxe à Palm Jumeirah ou Emirates Hills, vendues à plus de 10 millions d’euros, pourraient perdre entre 1,5 et 2 millions d’euros de valeur au cours des 12 prochains mois.

Immobilier commercial

Le secteur des bureaux est également vulnérable, notamment en raison de la généralisation du télétravail et de la baisse de la demande pour les espaces premium. Dans des quartiers d’affaires comme le DIFC ou Business Bay, les taux de vacance atteignent déjà 20 %. Fitch prévoit une baisse des loyers de 10 à 12 % dans ces zones.

L’immobilier commercial de détail se montre plus stable, mais les commerces situés dans les zones touristiques pourraient souffrir d’une baisse de fréquentation due à l’incertitude économique mondiale.

Réaction des acteurs du marché

Les principaux promoteurs, comme Emaar, Nakheel et Damac, ont déjà commencé à adapter leurs stratégies. Les ventes s’accompagnent de remises attractives, de plans de paiement plus flexibles et de partenariats bancaires offrant des conditions de crédit préférentielles.

Par ailleurs, les investissements dans les projets « build-to-rent » augmentent, tout comme le développement de résidences hôtelières ou de biens destinés à la location courte durée, qui restent populaires auprès des expatriés et des nomades digitaux.

Risques géopolitiques et réglementaires

Fitch souligne la dépendance structurelle de Dubaï au capital étranger. Les sanctions, les fluctuations monétaires ou les tensions géopolitiques dans les pays d’origine des investisseurs peuvent fortement perturber les flux de capitaux.

Les tensions persistantes au Moyen-Orient, combinées aux restrictions imposées par certains pays occidentaux, pourraient réduire le nombre d’investisseurs fortunés attirés par le marché de Dubaï.

D’un point de vue réglementaire, les autorités locales ne prévoient pas de réformes majeures. Contrairement à Singapour ou Hong Kong, il n’existe pas de taxes élevées sur la revente ni de restrictions pour les acheteurs étrangers. Cela attire les capitaux, mais accroît également le risque de spéculation.

Impact sur l’économie de l’émirat

L’immobilier est un pilier essentiel de l’économie de Dubaï. Selon le Dubai Statistics Center, les secteurs de la construction et de l’immobilier représentaient environ 22 % du PIB de l’émirat en 2024. Une baisse de 15 % du marché immobilier pourrait ralentir significativement la croissance économique, surtout si elle s’accompagne d’une baisse du tourisme ou de la volatilité des prix du pétrole.

Des répercussions sur l’emploi sont également à prévoir, le secteur du bâtiment employant une part importante de main-d’œuvre étrangère, notamment venue d’Asie du Sud.

Scénarios envisagés

Fitch propose trois scénarios :

  • Scénario de base : baisse de 15 % en 2025, suivie d’une stabilisation et d’une reprise modérée en 2026, avec un retour de la demande et une baisse des taux.
  • Scénario pessimiste : chute de 20 % et stagnation pendant 2 à 3 ans, avec un stock élevé de biens invendus.
  • Scénario optimiste : correction limitée à 8–10 % si la population augmente plus vite, que les programmes d’immigration s’élargissent et que de nouvelles incitations gouvernementales sont mises en place.

Recommandations pour les investisseurs

Les analystes conseillent une grande prudence en 2025. Il est recommandé de se concentrer sur des biens liquides et prêts à l’emploi dans des quartiers bien desservis (Jumeirah Lakes Towers, Downtown Dubai) pour limiter les risques.

Les projets en phase de lancement ou situés dans des zones à forte concurrence doivent être évités.

La location courte durée reste un secteur porteur : malgré une baisse des prix, la rentabilité annuelle via des plateformes comme Airbnb pourrait rester autour de 5 à 7 % avec une bonne gestion.

Conclusion

La prévision de Fitch annonçant une baisse de 15 % du marché immobilier à Dubaï souligne la fragilité de la récente phase de croissance et la vulnérabilité du marché face aux chocs économiques et géopolitiques. Bien que l’après-Covid ait relancé le secteur, les risques fondamentaux (surchauffe, dépendance au capital étranger, instabilité politique) compromettent la durabilité de cette dynamique.

Pour les investisseurs, 2025 devra être une année de réorientation stratégique, avec un recentrage sur des actifs stables et générateurs de revenus. Pour les promoteurs, il faudra s’adapter aux nouvelles réalités et mieux répondre à la demande réelle.

Dubaï conserve son attractivité mondiale, mais préserver ce statut nécessitera une approche plus équilibrée et résiliente du développement immobilier.

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