En 2025, le secteur de l’immobilier logistique se retrouve coincé entre un développement en ralentissement et une demande toujours soutenue. Les taux de vacance ont légèrement augmenté sur certains marchés, mais le nombre de nouveaux projets chute à son plus bas niveau depuis plus de dix ans. La majorité des chantiers en cours étant déjà pré-loués, le stock d’entrepôts modernes se réduit au moment même où le e-commerce et le nearshoring ajoutent de nouvelles couches de demande. Résultat probable, selon les analystes : un nouveau resserrement d’ici fin 2025, avec des loyers en hausse dans les emplacements prime.
Un pipeline en baisse malgré une activité de location stable
En Europe, CBRE rapporte que les volumes de location restent supérieurs aux moyennes d’avant-pandémie, mais les mises en service ralentissent et les projets spéculatifs représentent moins de la moitié des surfaces en construction. JLL confirme la tendance mondiale : les nouveaux lancements sont à des niveaux historiquement bas en Europe comme aux États-Unis, avec près des trois quarts du pipeline américain déjà engagés. Ce déséquilibre devrait réduire les taux de vacance au cours de l’année, annulant l’accalmie temporaire liée au pic de livraisons en 2024 et début 2025.
L’empreinte structurelle du e-commerce
Le e-commerce continue de transformer la demande logistique. Selon Prologis, la préparation des commandes en ligne requiert environ trois fois plus d’espace que la distribution traditionnelle, un ratio stable depuis dix ans. Eurostat indique que 77 % des Européens ont effectué des achats en ligne en 2024, expliquant l’expansion continue des réseaux de livraison. En 2025, la croissance devrait moins venir de nouveaux acheteurs que de la hausse des dépenses par client — accentuant la pression sur les systèmes logistiques et renforçant la nécessité d’entrepôts proches des centres urbains.
Nearshoring et régionalisation
Les stratégies de nearshoring redessinent la carte industrielle. Le Mexique est devenu un exemple phare, alors que les entreprises réorganisent leurs chaînes d’approvisionnement plus près de l’Amérique du Nord. Le taux de vacance national a atteint environ 6 % en 2024 après un pic de mises en service, mais la demande reste forte à Monterrey et dans d’autres pôles. Avec un ralentissement de la construction, ces marchés devraient rapidement se tendre, confirmant le nearshoring comme moteur structurel de la demande logistique.
Loyers prime en logistique en Europe (€/m²/mois)
Les loyers prime en Europe restent solides, certains marchés progressant encore sous l’effet de la compétition pour des entrepôts modernes bien situés. Les zones métropolitaines denses et les portes d’entrée de transport affichent la dynamique la plus forte, les utilisateurs étant prêts à payer une prime pour la proximité des consommateurs et des infrastructures :
- Pays-Bas (Amsterdam/Schiphol) : environ 10,0 €, soutenus par la rareté du foncier proche de l’aéroport
- Allemagne (Hambourg) : stable à 8,50 €, reflétant la puissance du hub portuaire
- Espagne : Barcelone (ZAL) en hausse à 9,0–9,2 €, Madrid stable à 6,6–6,9 €
- Tchéquie (Prague) : environ 7,5 €, plus pour les projets urbains
- Italie (Milan, Rome) : 5,6–5,8 €, stables dans les principales agglomérations
- Pologne : grands entrepôts à 3,2–5,75 €, logistique urbaine entre 4,0–8,25 € à Varsovie et Cracovie
Les sites dotés de connexions électriques solides, d’agencements adaptés à l’automatisation et d’un accès immédiat aux grands bassins de consommation restent ceux qui captent les primes les plus élevées.
Les utilisateurs anticipent pour sécuriser des surfaces
Selon l’enquête 2025 de CBRE, 96 % des entreprises prévoient de maintenir ou d’étendre leur parc d’entrepôts. Les prestataires logistiques et opérateurs de colis dominent les nouvelles demandes, signant souvent des baux en amont de la livraison des projets. Comme le souligne le Dr Carl Deppisch, Head of European Industrial and Logistics Occupier chez CBRE, les utilisateurs disposent désormais d’un peu plus de choix qu’au cours des années de pandémie, mais le ralentissement de l’offre spéculative suggère que cette fenêtre pourrait vite se refermer.
Le sentiment des investisseurs se stabilise
Après deux années de corrections de prix, l’appétit des investisseurs revient. Les rendements prime se sont stabilisés sur plusieurs marchés européens et les flux de capitaux vers la logistique ont légèrement augmenté début 2025. Les investisseurs ciblent les hubs centraux, les corridors liés au transport et les actifs conformes aux normes ESG, misant sur une croissance locative régulière à un chiffre bas.
Perspectives
Le marché entre dans une nouvelle phase. Les taux de vacance restent maîtrisés, mais l’effondrement des nouveaux projets et le haut niveau de pré-locations annoncent une offre plus limitée fin 2025 et au-delà. Les entreprises en expansion sont invitées à sécuriser leurs sites tôt et à privilégier des actifs capables de supporter l’automatisation, l’électrification et les exigences de durabilité. Pour les investisseurs, la logistique continue de s’imposer comme l’un des secteurs immobiliers les plus attractifs — porté par des moteurs de demande structurelle qui ne montrent aucun signe d’affaiblissement.